Sandman

Démarré par samizo kouhei, Décembre 10, 2012, 08:39:42 PM

« précédent - suivant »

samizo kouhei

J'inaugure la nouvelle rubrique comics avec un sujet sur Sandman, à l'occasion de la sortie du premier tome de la version Deluxe chez Urban.



Dans la lignée de sa campagne de réédition des grands classiques de DC, c'est en effet un nouveau chef d'oeuvre des comics que nous propose Urban : Sandman, dans sa version Absolute, soit les 2 premiers TPB (parus en leur temps en français chez Delcourt et Panini), avec quelques bonus issus de Sandman Companions, très utiles pour l'analyse de l'oeuvre par ses auteurs.

Pour ceux qui ne connaîtraient pas cette oeuvre monumentale, qui a été publiée aux Etats-Unis de 1989 à 1996, il net en scène Dream, alias Morphée, Sandman, ... En d'autres termes, il s'agit du Roi des Rêves et par extension de la création artistique. Rêve est un des Infinis, des représentations anthropomorphiques de concepts régissant la vie des hommes : Death, Destiny, Desire, Delirium, ... Bien plus qu'un récit horrifique (particulièrement sur les 2 premiers arcs contenus dans ce volume), le titre est une relecture de récits et de contes issus de tous âges et raconte l'évolution de Dream (qui par ses pouvoirs et son immortalité a du mal à comprendre les hommes), ses relations compliquées avec ses frères et soeurs les Infinis ... Même si on peut lire les différents arcs séparément, on se rend vite compte que tout détail, tout personnage même insignifiant de prime abord jouera un rôle dans l'intrigue, parfois des années plus tard.

Le scénariste, Neil Gaiman, est un écrivain anglais spécialisé dans le fantastique, auteur de Coraline, Stardust, et de bien autres oeuvres. Dans les comics, outre Sandman, il a oeuvre entre autres sur 1602 pour Marvel.

Dans le premier épisode, qui se déroule en 1916, Dream est arraché de son royaume et emprisonné sur Terre par un rituel d'un mage qui voulait capturer la Mort. L'emprisonnement de Dream a des conséquences désastreuses avec des gens qui ne peuvent plus dormir ou qui au contraire ne se réveillent plus. Ce n'est que 70 ans plus tard qu'il peut s'échapper. S'en suivent 6 épisodes où le Sandman part à la recherche de ses artefacts (un masque, un sac de sable et un rubis), et croise la route de Lucifer, John Constantine ou bien encore de l'Epouvantail.

L'épisode 8 marque une rupture avec l'apparition de Death, qui contre toute attente est une jeune fille enjouée.

L'arc suivant, entrecoupé de one-shots a priori insignifiants (un conte africain, les rencontres centenaires entre Dream et un homme qu'il a rendu immortel) voit le Maître des Rêves partir à la recherche de serviteurs qui sèment la pagaille sur Terre.

Il ne faut pas envisager cette oeuvre comme une BD, mais comme un "roman graphique", tant le contenu est littéraire (sans tomber dans le pompeux). Gaiman est un maître pour tisser un univers onirique aux recoins très sombres (l'épisode 6 où John Dee torture jusqu'à la mort les clients d'une cafeteria ; les récits des exactions des serial killers en séminaire). Je ne saurais que conseiller la lecture de Sandman aux gens réfractaires aux comics en temps normal, tant le titre se hisse à un autre niveau par ses exigences artistiques (même si le dessin n'est pas forcément le point fort du titre).

pippoletsu

Ah je ne savais pas qu'ils les ressortaient.
Un des comics les mieux écrits qui soit...

samizo kouhei



2ème tome de la version française de l'édition Absolute Sandman, toujours par Neil Gaiman et pléthore d'artistes à l'illustration. La série prenait définitivement son envol avec ces épisodes, concentrés en 2 parties (et 2 TPB lors de la première édition) :

Le pays du Rêve : 4 épisodes indépendants qui ont pour fil conducteur le souhait et ses conséquences. Le point d'orgue de ces épisodes est le #19, Songe d'une Nuit d'Eté, qui relate la représentation de la pièce éponyme de William Shakespeare devant le peuple des Fées (qui voient donc des acteurs humains jouer leurs rôles !). Dans le premier volume de Sandman, Shakespeare avait passé un marché avec Morphée ; l'inspiration contre 2 pièces commandées. Dans cet épisode qui hisse la série au delà du cercle BD, une mise en abyme entre la pièce, les commentaires des Fées, ainsi que le drame qui se noue autour d'Hamnet, le fils de Shakespeare, tandis que ce dernier, stressé par la représentation, en est inconscient. Cet épisode fut très longtemps la seule BD a remporter un prix littéraire : le World Fantasy Award de la meilleure nouvelle.

La saison des Brumes : Après un repas particulièrement houleux avec ses frères et soeurs les Infinis, Morphée décide de sauver sa bien-aimée Nada qui croupit depuis 10 000 ans en Enfer (par sa faute). Dans le tout premier arc de la série, son voyage s'était mal passé, puisqu'il avait dû batailler avec un démon pour récupérer son casque, tandis que le maître des lieux, Lucifer, l'avait menacé de le tuer s'il remettait les pieds en Enfer. Morphée se prépare à livrer un combat ... qui n'a pas lieu, car Lucifer décide d'abandonner la direction de l'Enfer ! Il laisse Morphée le soin de donner les clés (littéralement) à un nouveau maître. S'en suit un défilé presque exhaustif des panthéons et forces primordiales.

Le volume est agrémenté d'une centaine de pages de bonus : entretiens avec Neil Gaiman, crayonnés, commentaire page par page du fameux épisode #19. La série concilie dès lors succès critique et commercial.

En tout cas une excellentissime lecture, à conseiller plus que jamais même aux non-lecteurs de comics.

pippoletsu

Tu n'as pas peur qu'ils soient un peu rebuté par la difficulté à parcourir certaines planches parfois ?

samizo kouhei

J'ai terminé ce matin la lecture du tome 3. Déjà, je voudrais apporter une rectification : l'édition d'Urban ne correspond pas à l'édition Absolute américaine (ce n'est pas le même découpage, et l'édition d'Urban publie en "tranches" le contenu du Companions, les entretiens où Gaiman analyse son oeuvre). On voit assez peu le Maître du Rêve dans ce volume, composé de plusieurs one-shots prenant place à différents moments de l'Histoire (on croise notamment Robespierre, Marco Polo ou Auguste) et d'un arc mettant en scène un personnage secondaire apparu dans la Maison de poupées (un arc précédent) qui doit accomplir une quête dans le monde imaginaire de son enfance. Il y a aussi un épisode de la série Sandman Mystery Theater (mettant en scène un autre Sandman, le justicier de pulp Wesley Dodds, muni d'un pistolet à gaz soporifique) se déroulant dans le manoir où Morpheus croupit déjà depuis 20 ans (l'histoire se passe en 1939).
L'auteur s'éloigne définitivement du genre horrifique (même s'il y a une scène très graphique d'arrachage de visage) pour livrer une oeuvre ambitieuse, sans concessions, belle et cruelle.

slyt

iI y a (aura) combien de volumes ? car ça me tente bien.

De Urban Comics, j'ai le "KINGDOM COME". Que je trouve très bon au passage.
Est-ce que Sandman est mieux encore ?

pippoletsu

Euh c'est extrêmement différent. Kingdom Come, qui est LE Putain de chef d'oeuvre de Ross et Millar, ça reste du DC super héros et tout le tralala.
Sandman, c'est autrement plus difficile à appréhender, c'est quand même scenarisé à la base par un romancier Neil Gaiman et ça donne une densité peu commune même pour un roman graphique. Il y a toute une mythologie bien dense qui se met en place autour de Dream et des éternels et qui est passionnante mais le style graphique change souvent. Ça colle très bien avec le propos (Dream est donc la personnalisation du rêve, de l'imagination de la fantaisie et peut se permettre beaucoup de chose, mais pourtant pas tout pour une entité si puissante) mais ça peut aisément destabiliser. Essaie un volume (il y en avait 11 dans l'édition ancienne que j'ai) et vois si tu veux continuer, c'est difficile de donner un go ou no go direct vu la spécificité et la densité de l'oeuvre...

slyt

Je me doutais que c'était bien différent.  Bon un petit tour à la FNAC s'impose en attendant noël et de recevoir le "DC comics anthologie" (je fais dans le sûr et efficace)...
merci en tout cas

samizo kouhei

Il y aura 7 volumes en tout chez Urban (à 35€ pièce, mais pour plus de 400 pages ça va), mais à l'origine il s'agissait effectivement de fascicules ensuite réédités en 10 TPB (qui revenaient plus cher en fin de compte), publiés en français d'abord par Delcourt puis par Panini.
Je te conseille de lire le premier, et de voir si le dessin ne te rebute pas (car les artistes qui ont participé ont souvent des styles très particuliers qui seraient bien peu adaptés aux comics de super-héros) ni l'horreur (même s'il n'y a réellement que les 2 premiers arcs, contenus dans le premier volume de l'édition d'Urban, qui soient vraiment horrifiques).
Le plus incroyable avec cette série, c'est qu'elle fut un carton critique et commercial à l'époque de sa sortie (le titre se vendait plus que Superman !) et qu'elle est quand même parue en plein âge sombre des comics (Knightfall, la Saga du Clone et autres joyeusetés).
Je ne sais pas si vous le savez, mais Gaiman a remis récemment le couvert avec une "préquelle" expliquant comment Sandman a pu être capturé au début de la série. Et d'un point de vue graphique, là par contre, y a pas à tortiller du cul (si vous me passez l'expression) car c'est du JH Williams III :


slyt

J'ai vu le pavé hier à la FNAC. Holly shhhh!
Le graphisme ne m'a pas rebuté, mais j'y retournerai après les fêtes quand il y aura moins de monde pour le feuilleter tranquillement

samizo kouhei

Sandman ne se feuillette pas, il se lit.

slyt

Citation de: samizo kouhei le Décembre 16, 2013, 10:01:11 AM
Sandman ne se feuillette pas, il se lit.

Je savais que tu allais tiquer :)
promis, je prendrais mon temps pour le déguster.

samizo kouhei

Le tome 4 est finalement sorti en juin. Il regroupe l'arc Vies Brèves, qui en dépit de son caractère presque anodin (il ne s'y passe pas grand chose) confirme que Sandman est un titre majeur, puisque même une histoire mineure reste supérieure à 90% de la production américaine, et encore aujourd'hui

samizo kouhei

Le tome 5 est sorti vendredi. Tuerie, évidemment. Dans le tome 7, on aura droit au Dream Hunters illustré par .... Yoshitaka Amano !  :love:

pippoletsu

J'ai déjà tout dans l'ancienne édition.